Si le nom d’une rue reflète ce qui est important pour une ville, combien de noms de rues au féminin trouve-t-on à Munich ? Un comptage avait été réalisé en 2001. Alors nous avons saisi l’occasion de cette Jounée Internationale de la Femme pour le mettre à jour et voir Munich autrement…
Nombre de rues au féminin : un ordre d’idées ?
Interrogée, Maren Kowitz du Kommunalreferat/GeodatenService, nous a répondu que l’on compte 6.261 noms de rues dans la capitale bavaroise. Elles font en très grande majorité référence à des noms d’hommes. Ainsi, en 2001 on pouvait répertorier seulement 8% de rues nommée d’après une femme. Et en 2021, une légère augmentation s’est amorcée avec 12,6% de noms de rues au féminin.
Et les 3.151 autres ?
Ah oui, c’est vrai qu’il existe environ 3.000 rues de Munich portant le nom d’un personnage féminin de la mythologie, de la religion catholique – comme, par exemple, Marienplatz – de la poésie ou du théâtre. Mais elles ne comptent pas dans la distinction hommes-femmes qui nous intéresse car ce ne sont pas les critères retenus.
Quels sont les critères retenus pour nommer des rues au féminin ?
Christina Frank, Kommunalreferentin, membre de la municipalité, déclarait ainsi :
« Nommer une rue est le plus grand honneur que la ville de Munich puisse accorder. Et en même temps, le fait de nommer une rue reflète ce qui est important pour une ville. Les personnes ainsi honorées montrent bien ce qu’est Munich. Ce sont, entre autres :
- des femmes fortes qui ont déjà fait progresser l’égalité au début et au milieu du siècle dernier
- des femmes artistes qui ont eu une influence décisive sur leur domaine
- et des survivantes de l’Holocauste qui se sont à nouveau battues pour un « Plus jamais ça » ».
Dernière mise à jour : le 04.02.2021
Le Conseil Municipal a décidé encore récemment d’offrir une plus grande place aux femmes dans l’espace public. Pour cela, il profite des nouvelles zones résidentielles en construction. Car, comme le précise Maren Kowitz, changer le nom d’une rue existante est très rare, du fait des nombreuses répercussions administratives, sauf en cas de force majeure / moralité. Ce fut le cas, cependant, avec la Katharina-von-Bora Str. qui a remplacé la Meiser Str, à l’origine en hommage à un évêque protestant, reconnu par la suite être antisémite.
Nouveaux quartiers, nouveaux noms de rues au féminin
Les nouveaux espaces résidentiels en construction dans les 4 coins de la ville vont précisément les mettre en valeur.
A Feldmoching-Hasenbergl, à l’est de la Hochmuttinger Str. il y aura :
– la Lilli-Kurowski-Straße. Lilli Kurowski (1939 à 2019), avocate, assistante sociale et militante des droits des femmes, était particulièrement engagée dans la lutte contre la pauvreté et la violence à l’égard des femmes.
– la Marie-Juchacz-Straße, du nom de Marie Juchacz (1879 à 1956). Co-fondatrice de l’Association pour le bien-être des travailleurs, Marie Juhacz fut la première femme à faire un discours à l’Assemblée nationale de Weimar.
– la Amsi-Kern Way-Straße du nom d’Amsi Kern (1922 à 2002), actrice ayant dirigé le Tegernsee Volkstheater et le Chiemgau Volkstheater.
– le Erika-Fuchs-Weg. Erika Fuchs (1906 à 2005) a été la rédactrice en chef de l’édition allemande du magazine de bande dessinée Micky Maus à partir de 1951. Ses créations de mots (stöhn, bibber, zitter…) ont influencé le langage familier.
A Schwabing-Freimann, autour de la Bayernkaserne, on trouvera :
– la Henny-Seidemann-Straße. Henny Seidemann (1922 à 2012) a dû fuir après la prise du pouvoir par les nazis mais elle est revenue à Munich en 1957 pour s’occuper des survivants traumatisés de l’Holocauste. Elle a présidé la Société pour la coopération judéo-chrétienne.
– la Friederike-Nadig-Allee porte le nom de Friederike Nadig (1897 à 1970). Membre du SPD, elle a fait passer la formulation « les hommes et les femmes ont des droits égaux » dans la Loi fondamentale au Conseil parlementaire. Elle a été membre du Bundestag allemand de 1949 à 1961.
S’il ne fallait en retenir qu’une…
Connaissez-vous la Agnes-Bernauer-Str. ? Albert de Bavière sous le charme de la belle Agnes Bernauer (1410-1435) l’épousa. Mais son père, Ernest de Bavière, en fut scandalisé car c’était une simple roturière. Ni une ni deux, il la fit accuser de sorcellerie et noyer !
Les destins tragiques ont souvent fait de belles héroïnes. De fait, Agnes Bernauer a inspiré de nombreux poètes. Son nom est très présent dans une longue rue du quartier de Laim. Enfin, dernier hommage, elle se trouve magnifiée par cette émouvante statue située devant le château de Blutenburg.
Laure Wilkinson et Agnès Tondre