Un nouveau départ pour le Migrationsbeirat

Cour intérieure de la mairie de Munich à Marienplatz
Cour intérieure de la mairie de Munich © Agnès Tondre / Vivre à Munich

Vivre à Munich vous avait présenté les enjeux des élections du nouveau Migrationsbeirat, le 22 janvier 2017. Avec près de 400.000 habitants d’origine étrangère Munich a choisi de leur laisser la parole depuis plus de 40 ans au sein d’un Conseil des Immigrés (Migrationsbeirat). Avec quel objectif ? Favoriser leur intégration dans la société, dans un esprit de tolérance envers les racines des uns et des autres. Le Migrationsbeirat est composé de 40 sièges et d’un président, porte-parole du Conseil pour 6 ans.

Mais à quoi bon ? – s’est demandé la mairie de Munich, après les élections du 22 janvier 2017. En effet, seuls 3,62 % des 367.927 étrangers pouvant voter ont participé au vote. Ce qui représente une abstention record de plus de 96 % ! Par ailleurs, le fait que 14 des 40 sièges reviennent aux listes de nationalistes turcs a plus encore affolé la mairie de Munich, la légitimité de cette assemblée semblait remise en question. Le CSU a même demandé la dissolution du Migrationsbeirat.

Lire l’article d’Abendzeitung.

La ville de Munich attendait avec fébrilité le résultat de l’assemblée du 17 mars pour, au mieux constituer cette assemblée, au pire, la dissoudre.

Résultats des élections (officiels depuis le 27.02.17) 

  • 3,62 % de votants soit 96, 38 % d’abstention, un record.
  • Deux Françaises ont été élues : Dominique Claasmeier, de la liste « Franzosen für München » et Juliette Grujon-Béthancourt pour « Vielfalt leben- Integration gemeinsam gestalten« . Un francophone, Hamado Dipama,de la liste « Aktiv International Solidarisch« est également élu.
  • 14 des 40 sièges reviennent aux listes de nationalistes turcs :
    • 5 sièges accordés à « Initiative Ay Yildiz« , liste dirigée par Eyyup Tanriverdi,
    • 1 siège à Levent Ekiz, de la liste « Neue Europäer »; ces deux groupes soutiennennt le mouvement Ülkücü, dont les membres, appelés les loups gris, sont fichés comme  déterminés à user de violence (gewaltbereit) par la Bundeszentrale für politsche Bildung ( AZ du 26.01.17).
    • 8 sièges sont attribués à la liste « Atlas », proches du parti AKP.

Enjeu de l’assemblée du 17 mars 2017

Si le Migrationsbeirat est constitué de citoyens voulant oeuvrer à l’intégration d’autres migrants, ils ne sont pas élus en fonction de leur appartenance à un parti politique. Leur rôle est  cependant politique car ils s’expriment lors des conseils municipaux.

Or les élus turcs sont proches des idées politiques du président Erdogan; leurs conceptions, d’extrême-droite, de la vie politique sont perçues comme anti-démocratiques par la mairie de Munich.

Il semblait hors de question de leur laisser présider le Migrationsbeirat.

Victoire du libéralisme sur l’extrêmisme

Les 3 candidats à la présidence du Migrationsbeirat ont exprimé leur credo devant une assemblée nombreuse, réunie dans la grande salle du Conseil de la mairie de Munich.

Et le plus éloquent était sans conteste celui de Gönül Kurt, représentante de la liste turque « Atlas« . Il faut dire qu’elle est avocate, allemande née à Solingen, parlant parfaitement les deux langues et habituée aux effets de style. Défendant régulièrement le droit des migrants et luttant contre leur discrimination, Gönül Kurt a eu beau plaider pour une société multiculturelle, sans racisme, son discours n’a pas fait mouche.

Sa plaidoirie était remarquable mais était-elle sincère ? Car les précédentes prises de position de la tête de liste, Ender Beyhan-Bilgin, représentante du parti AKP, pro-Erdogan ( elle avait affirmé faire confiance à la justice de son pays, la Turquie, en ce qui concerne la gestion du problème de l’emprisonnement de journalistes allemands ) ont laissé des traces. Elle n’a reçu que 13 voix sur 40.

Levent Ekiz, du groupe « Neue Europäer« , s’est fait remarquer récemment en s’imposant lors d’une réunion démocratique à laquelle il n’avait pas été invité. Cette action d’éclat n’a pas plaidé en sa faveur. Et s’il a eu le mérite de présenter ses co-listiers davantage que lui-même, il n’a pas convaincu car il cristallisait trop de peurs. Seuls 6 élus ont voté pour lui.

C’est finalement Dimitrina Lang, de la liste libérale, d’origine bulgare, habitant Munich depuis 16 ans qui a reçu 21 voix sur 40 et a donc été élue à la majorité. Âgée de 39 ans, fonctionnaire au Jugendamt de Munich depuis 8 ans et en charge des migrants, elle a été fort applaudie. Son discours reflétait une ligne modérée qui a rassuré les électeurs du Migrationsbeirat. Un ouf de soulagement a parcouru la grande salle de la mairie de Munich.

Lire aussi l’article de Sueddeutsche Zeitung.

Quelles suites à attendre ?

Le Migrationsbeirat élu le 22.01.2017 est donc confirmé le 17.03.2017 pour les 6 ans à venir.

Les commissions chargées des différents thèmes ( aides à la famille, lutte contre le racisme et la discrimination, subventions, organisations d’événements etc) sont en cours de constitution.

Bon à savoir : Le Migrationsbeirat organise demain, mardi 21 mars, une manifestation anti-racisme. Départ à 18h de Karslplatz Stachus en direction de Marienplatz, où l’arrivée du cortège est prévue à 20h.

Dimitrina Lang © Agnès Tondre / Vivre à Munich

Agnès Tondre

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